Les voitures à hydrogène vivotent, alors que les véhicules électriques sont en plein essor. En Suisse, moins de cent voitures H2 circulaient sur les routes début 2021, dont 27 Toyota Mirai et 58 Hyundai Nexos. Sur l’axe de circulation est-ouest, il n’existe que neuf stations-service à hydrogène. Mais commençons par les bases.
Présentation de la voiture à hydrogène
Les voitures à hydrogène sont souvent qualifiées de «voitures à pile à combustible»: leurs cellules de quelques millimètres d’épaisseur produisent de l’électricité au contact de l’hydrogène (stocké dans des réservoirs sous forme de gaz sous pression à 700 bars) et de l’oxygène. Comme pour les voitures électriques, l’électricité ainsi produite alimente un moteur électrique. Il n’y a pas besoin de grosse batterie et les «gaz d’échappement» ne sont que de la vapeur d’eau.
Comment produit-on l’hydrogène?
L’hydrogène est produit par électrolyse de l’eau, qui consiste à décomposer l’eau en dioxygène et en dihydrogène avec un courant électrique. Si l’on s’interroge sur le caractère écologique des voitures H2, il est impératif de s’intéresser à l’électricité utilisée pour l’électrolyse: était-elle d’origine fossile ou renouvelable? Seul de l’«hydrogène vert» permet d’avoir des véhicules neutres en CO2 et donc durables.
La grande densité énergétique, principal atout de l’hydrogène
Quels sont les avantages de l’hydrogène?
L’hydrogène convainc grâce à sa grande densité énergétique: comparé aux batteries et à poids égal, il permet de stocker davantage d’énergie. C’est donc un excellent réservoir transportable de grandes quantités d’énergie, p. ex. pour les transports longue distance en camion ou en bateau. Le plein se fait en quelques minutes, à peine plus que pour de l’essence ou du diesel, mais nettement moins que pour une voiture électrique. Et le prix à la pompe n’est pas plus élevé que celui des carburants conventionnels.
Obstacles à la diffusion: le coût des véhicules et des stations-service
Tu te dis sans doute qu’il fallait bien qu’il y ait une ombre au tableau. Et tu as raison! Ainsi, le prix d’une voiture à hydrogène oscille actuellement entre 60’000 et 90’000 francs, alors qu’une voiture électrique est disponible à partir de 19’000 francs selon le guide TCS, et qu’on compte au total dix véhicules à moins de 35’000 francs sur le marché suisse. Et des sommes considérables sont en jeu pour les stations-service: la construction d’une station H2 coûte entre 1 et 1,5 million de francs.
Construire une station à hydrogène est un projet ruineux
Les réservoirs haute pression pour le stockage de l’hydrogène et les compresseurs spéciaux pour créer jusqu’à 1 000 bars de pression sont très coûteux. Pour information, cela équivaut à la pression à 10’000 mètres de profondeur dans l’océan ou à 500 fois la pression des pneus d’une voiture. Les pompes et l’unité de refroidissement coûtent aussi relativement cher. Cette unité permet d’éviter une surchauffe de l’hydrogène et de réaliser le plein de la voiture rapidement. En comparaison, construire une station de recharge électrique AC publique est un projet à quatre ou cinq chiffres – un autre monde. Les stations de recharge rapide DC ont elles plutôt un coût à six chiffres.
Autres freins aux voitures H2
Mais l’argent n’est pas le seul obstacle aux voitures H2. D’autres facteurs, comme la durabilité, jouent un rôle. Si l’on observe la chaîne d’effets «well to wheel», de l’approvisionnement et de la mise à disposition de l’électricité motrice à la transformation en énergie cinétique, les véhicules à hydrogène s’en sortent nettement moins bien que les voitures électriques. En effet, la production d’hydrogène est doublement minée par son besoin et sa transformation en électricité. Un autre frein à la filière hydrogène est la priorité donnée à l’électromobilité chez les constructeurs automobiles, favorisant ainsi les progrès de cette technologie. Enfin, la peur des explosions persiste, bien que les experts n’y voient aucun danger accru. L’hydrogène, extrêmement volatil, est 14 fois plus léger que l’air et ne peut donc pas former de «lacs de gaz» dangereux.
Comment rendre l’hydrogène plus attrayant?
Fondée en 2018, l’association de promotion «Mobilité H2 en Suisse» veut améliorer la situation médiocre du réseau de stations-service. Elle réunit ainsi des spécialistes d’entreprises et d’organismes de recherche de tous les domaines de la technologie à hydrogène. Une hausse des stations à hydrogène ferait aussi baisser les coûts des composants complexes, comme les compresseurs et réservoirs sous pression.
La clé du succès: des quantités accrues pour réduire les coûts
La production des piles à combustible doit par ailleurs être accélérée et devenir moins chère. Le fabricant de pneus Michelin et l’équipementier automobile Faurecia collaborent depuis 15 ans déjà . En 2021, ils planifient la construction d’une nouvelle usine de piles à combustible en région lyonnaise, qui sera l’une des plus grandes d’Europe. Dans quatre ans, il est prévu de produire 20’000 systèmes à pile par année, et plus de 200’000 d’ici la fin de la décennie. «En 2030, les coûts de production devraient représenter un dixième de ce qu’ils sont actuellement», déclare Anish Taneja, président de la région Michelin Europe du Nord, au journal en ligne faz.net. Les spécialistes s’accordent eux pour dire qu’on pourrait produire des véhicules à pile à combustible à des prix semblables à ceux des voitures électriques en franchissant le seuil de centaines de milliers d’unités.
Réduction de 90% des coûts des piles à combustible d’ici 2030
Pourquoi Mobility ne mise-t-elle pas encore sur l’hydrogène?
Mobility prévoit de passer complètement à l’électromobilité d’ici 2030. «L’hydrogène est intéressant pour sa grande densité énergétique», confirme Viktor Wyler, responsable de flotte de Mobility. «Néanmoins, les prix, le réseau restreint de stations-service et les évolutions du marché s’opposent à son utilisation dans le car sharing actuellement.» En outre, cette technologie n’est pertinente pour Mobility que si elle est entièrement renouvelable, ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui selon M. Wyler. «Nous attendons de voir dans quelle direction la technologie va se développer.»
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